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Des suicides en baisse, mais des catégories vulnérables

Postée le 12/10/2020

L’Observatoire national du suicide dresse un état des lieux en France, avec un dossier sur les cas liés au travail ou au chômage.

D’après les données de l’Observatoire national du suicide (ONS), en 2016, la France a comptabilisé près de 9300 décès par suicide, avec une tendance à la baisse depuis les années 2000 [1]. L’ONS note un nombre de décès nettement plus élevé chez les hommes (6450) que chez les femmes (1985). Le nombre de séjours hospitaliers pour tentative de suicide s’élève à près de 90000 cas en 2017 et concerne davantage les femmes, surtout les jeunes filles.

La moitié des décès a touché des personnes en âge de travailler, entre 35 et 64 ans. Selon l’ONS, certains de ces suicides pouvaient être liés aux conditions de travail de ces personnes ou à leur manière de vivre une situation de chômage, tout en reconnaissant qu’il s’agit d’un phénomène multifactoriel. Des politiques spécifiques de prévention du suicide ont été élaborées ces dernières années. Malgré cela et bien que le travail soit considéré comme protecteur, ce quatrième rapport souligne que «certaines conditions de travail et certaines pratiques de management peuvent générer un climat anxiogène pour les travailleurs et créer des risques psychosociaux ». De même, l’impact de la perte d’emploi et l’inactivité forcée occasionnent des souffrances psychiques susceptibles de conduire au suicide; ce lien est difficile à établir. L’ONS préconise la conduite de travaux supplémentaires et l’amélioration du recueil des données administratives et statistiques pour mieux dénombrer les suicides, dont les conditions de travail ou l’absence de travail seraient les principaux motifs. Plusieurs actions de prévention mises en place auprès de professions à risque (policier, agriculteur, personnel de l’administration pénitentiaire et chef d’entreprise) sont également exposées. Elles ont permis d’améliorer le décompte des suicides et des tentatives de suicide, et d’ajuster l’offre de soutien pour mieux les prévenir.

Le suicide reste la deuxième cause de mortalité chez les jeunes, même si ce taux est faible. Les jeunes filles sont les plus nombreuses à passer à l’acte, avec un pic autour de 16 ans. On retrouve chez ces adolescents un état psychique très dégradé. Le rapport explique qu’il existe de nombreux signes d’alerte, même très banals.

La part des grands seniors (75 ans et plus) qui représentent 9 % de la population, est de 20 % des suicides. Plus ils avancent en âge, plus ils sont à risque, surtout les hommes. En effet, chez les plus de 95ans, 120 suicides sont masculins, quand il y en a dix fois moins chez les femmes. Dans ce rapport, il ne s’agit que de suicides actifs. En effet, il existe chez les personnes âgées une forme passive qui correspond à un lâcher-prise général et à un retrait social. Il faut cependant préciser que le suicide ne représente que 0,6 % des causes de décès des personnes de plus de 65 ans. La majorité de ces cas survient au domicile, rarement en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (probablement du fait de la grande dépendance des résidents empêchant un passage à l’acte). Il est difficile d’analyser ceux survenus en établissement hospitalier, car l’acte de décès ne mentionne pas le lieu de commission du geste suicidaire. L’endroit influe sur le mode opératoire – la pendaison est le moyen le plus fréquent, suivi par le saut dans le vide. Évaluer le risque suicidaire chez la personne âgée est complexe, car il faut connaître au minimum son parcours de vie pour identifier les ruptures.

(1)

Observatoire national du suicide. Suicide. Quels liens avec le travail et le chômage? Penser la prévention et les systèmes d’information. 4e rapport. Paris: ONS; 2020.  ons_2020.pdf#

Catherine Boisaubert, Valérie Lequien